[TECHNIQUE] Marchands de biens
Fiche technique
Comptabilité et fiscalité de base des marchands de biens
Comptabilité
Principe
Une société de marchand de biens n’a normalement pas, ou peu, d’immobilisations. Les divers achats (fonciers, travaux, frais annexes notamment) représentent pour elle une charge et non une immobilisation.
Les immobilisations peuvent toutefois exister si la société acquiert des biens qu’elle compte utiliser sur plusieurs projets (mobilier, Pc etc).
L’évaluation des stocks représente le point clé du bilan des marchands de biens.
Comptabilisation – en cours d’exercice
Les charges sont comptabilisées de la façon suivante :
- Les acquisitions de fonciers (terrains ou immeubles) sont comptabilisées en achats de matières premières (subdivision compte 601).
- Les travaux sont comptabilisés directement en charges (subdivision compte 605).
- Les frais accessoires directement engagés pour le projet sont comptabilisés en charges (subdivision compte 608).
- Les frais généraux non directement affectables à un projet, quand bien même il n’y en aurait qu’un seul sur la structure, sont comptabilisés dans les comptes de charges habituellement utilisés (subdivision 61 et 62).
Les recettes sont comptabilisées de la façon suivante :
- Les cessions d’immeubles ou de terrains sont comptabilisées en ventes de produits finis (subdivision compte 701).
La subdivision s’opère par lot. Le libellé du compte peut ainsi inclure le numéro du lot vendu ainsi que le nom des acquéreurs.
Cette subdivision permet un cadrage rapide avec les attestations de notaires et permet au marchand de biens de valider facilement l’exhaustivité des ventes comptabilisées à son bilan.
- Si un bien exploitable est loué dans l’attente de sa vente, les loyers sont comptabilisés en prestations de services (subdivision compte 706).
- Exemple de plan comptable professionnel en annexe
Comptabilisation – en fin d’exercice
Les charges de l’exercice N :
- Directement affectables aux lots invendus sont chiffrées et comptabilisées en stock (débit des comptes 331, 334 et 335 par le crédit de comptes 713).
- Directement affectables aux lots vendus ne font l’objet d’aucun traitement
- Représentant des frais généraux ne font l’objet d’aucun traitement
En cas de ventes d’une partie seulement des lots sur l’exercice, comment évalue-t-on les charges à neutraliser par le stock ?
Trois options se présentent :
- S’il est possible de clairement identifier les achats affectés à chaque lot, le chiffrage se fait au réel (méthode préférentielle mais très rarement applicable).
- A défaut la ventilation se fait par le calcul suivant :
- Sommation des charges globales engagées (comptes 60 de l’exercice et des exercices antérieurs)
- Multiplication de cette somme par le cumul des millièmes des lots invendus/1000.
- La différence entre la somme des charges (comptes 60) et la multiplication précédente représentant les charges des lots vendus (non neutralisée par le stock).
- Si le calcul aux millièmes ne peut être retenu, une logique identique est appliquée au prorata des m² des lots vendus.
Les recettes ne font l’objet d’aucun traitement particulier en fin d’exercice.
- Exemple en annexe 2
Une astuce ?
Lorsqu’aucun lot n’a été vendu sur l’exercice, nous pouvons contrôler le correct chiffrage du stock par l’édition de Soldes Intermédiaires de Gestion : la marge commerciale doit être à 0.
Documents nécessaires
Outre les documents habituellement demandés lors d’une clôture comptable, les éléments suivants sont nécessaires au bilan du marchand de biens :
- L’acte notarié d’acquisition du foncier initial signé
- Le du notaire pour l’acquisition du foncier initial relevé de compte acheteur
- Les attestations notariales de chaque cession de lot avec prix
- Le du notaire pour chaque lot vendu relevé de compte vendeur
Fiscalité
TVA
Les opérations de marchands de biens engagent généralement des sommes importantes. Il est ainsi essentiel d’identifier le régime de TVA de la totalité de l’opération dès le budget prévisionnel.
Principes
En matière de TVA, trois régimes d’imposition trouvent à s’appliquer : la TVA sur le prix total, la TVA sur marge ou l’exonération.
Le régime applicable dépend directement de la nature du bien vendu par le marchand de bien :
- Immeuble bâti :
- Achevé depuis moins de 5 ans (neuf) : TVA sur le prix total
- Achevé depuis plus de 5 ans : exonération totale
- Terrain :
- A bâtir : TVA sur le prix total
- Non à bâtir : exonération totale
Définitions
La notion d’immeuble achevé depuis plus ou moins de 5 ans doit faire l’objet d’une vigilance particulière lorsque des travaux ont été réalisés sur celui-ci. En effet, selon l’envergure des travaux réalisé par le marchand de biens, bien que le foncier initialement acquis ait été achevé depuis plus de 5 ans, l’importance des travaux réalisés peut nous faire considérer l’immeuble comme neuf au regard de la législation fiscale.
En cas d’exonération de TVA de plein droit sur les ventes, une option demeure toujours possible.
La doctrine fiscale nous indique, de façon exhaustive, la liste des travaux concernés. Sont ainsi considérés comme neufs, les immeubles faisant l’objet :

Concernant le dernier point :

L’essentiel
Dès lors que les ventes ne sont pas soumises à TVA, aucune TVA ne peut être déduite sur l’acquisition du foncier et sur les travaux.
En cas d’assujettissement des ventes à la TVA (de plein droit ou sur option), la TVA sur l’acquisition du foncier (s’il y en avait) et les travaux peut être déduite.
Quatre situations principales peuvent néanmoins se présenter :
- Nous savons que les ventes futures ne seront pas soumises à TVA : l’ensemble des charges sont comptabilisées TTC
- Nous savons que la totalité des ventes futures seront soumises à TVA : déduction de la TVA au fur et à mesure, sans demande de remboursement.
- Nous savons que certaines ventes uniquement seront soumises à TVA : déduction de la TVA au prorata des millièmes des lots vendus avec TVA, sans demande de remboursement.
- Nous ignorons à l’avance si les ventes seront soumises à TVA : Comptabilisation en TTC Puis calcul lors de la cession si l’option sur la TVA est intéressante, auquel cas réaliser une écriture pour déduire la TVA sur les opérations réalisées sur la projet.
Crédit à reporter ou demande de remboursement
Tant qu’aucun lot n’est vendu, le remboursement du crédit de TVA ne peut avoir lieu car les impôts demanderont de justifier l’assujettissement des ventes à la TVA, preuve impossible tant que les ventes n’ont pas eu lieu.
Il est ainsi préférable de reporter le crédit, et de l’imputer sur la TVA collectée des lots vendus avec TVA.
Astuce à donner au marchand de biens
S’il est prévu de gros travaux, ne jamais dépasser le seuil des 2/3 pour les travaux de seconds œuvres, exemple : Laisser une fenêtre non changée pour ne pas dépasser les 2/3 de ce poste.
Il est préférable que le client tienne un fichier excel en répertoriant chaque dépense affectée à chaque lot indiquant le montant HT et la TVA afin d’anticiper sa marge.
L’option à la TVA est intéressante si et seulement si l’opération est déficitaire.
Exemple de plan comptable spécifique aux marchands de biens
Comptes de charges :
- 601001 Achats foncier – Projet 1
- 601002 Achats foncier – Projet 2
- 605001 Travaux et honoraires – Projet 1
- 605002 Travaux et honoraires – Projet 2
- 608001 Frais annexes – Projet 1
- 608002 Frais annexes – Projet 2
Comptes de produits :
- 701011 Vente lot 1 – Projet 1
- 701021 Vente lot 2 – Projet 1
- 701012 Vente lot 1 – Projet 2
- 701022 Vente lot 2 – Projet 2
Comptes de stocks :
- 331001 Terrains et immeubles – Projet 1
- 331002 Terrains et immeubles – Projet 2
- 334001 Frais annexes – Projet 1
- 334002 Frais annexes – Projet 2
- 335001 Travaux – Projet 1
- 335002 Travaux – Projet 2
- 713301 Variation encours – Projet 1
- 713302 Variation en-cours – Projet 2
- 713501 Variation stocks immeubles achevés – Projet 1
- 713502 Variation stocks immeubles achevés – Projet 2
Exemple de comptabilisation des opérations de marchand de biens
Hypothèse :
- Achat d’un foncier pour 400 000 € en N
- Travaux pour 150 000 € en N
- Bien constitué de 2 lots dont la répartition des millièmes est la suivante : lot 1 = 400/1000, lot 2 = 600/1000
- Le lot 2 est vendu en N+1 et le lot 1 en N+2
Exercice N :
Balance avant écritures de bilan :
| Comptes | Débit | Crédit |
|---|---|---|
| 601000 Terrain | 400 000 € | |
| 605000 Travaux | 150 000 € |
Balance après écritures de bilan :
| Comptes | Débit | Crédit |
|---|---|---|
| 601000 Terrain | 400 000 € | |
| 605000 Travaux | 150 000 € | |
| 331000 Stock terrain | 400 000 € | |
| 335000 Stock travaux | 150 000 € | |
| 713300 Variation stocks | 550 000 € |
Aucune vente n’ayant été réalisée sur N, la marge est donc bien de 0 € (400 000 + 150 000 de charges compensées par 550 000 de produits en stocks).
Exercice N+1 :
Balance avant écritures de bilan : dans l’hypothèse où les travaux ont été entièrement réalisés sur N, aucune écriture particulière, seuls les frais généraux sont comptabilisés.
Balance après écritures de bilan :
| Comptes | Débit | Crédit |
|---|---|---|
| 701000 Vente lot 2 | 380 000 € | |
| 713300 Déstockage lot 2 | 330 000 € | |
| 331000 Stock terrain | 240 000 € | |
| 335000 Stock travaux | 90 000 € |
Pour un prix de vente du lot 2 de 380 000 €. La marge est donc de 380 000 – 330 000 = 50 000 €. Il reste ainsi en compte de stocks 33X000 = 220 000 €.
Exercice N+2 :
Balance avant écritures de bilan : dans l’hypothèse où les travaux ont été entièrement réalisés sur N, aucune écriture particulière, seuls les frais généraux sont comptabilisés.
Balance après écritures de bilan :
| Comptes | Débit | Crédit |
|---|---|---|
| 701000 Vente lot 1 | 250 000 € | |
| 713300 Déstockage lot 1 | 220 000 € | |
| 331000 Stock terrain | 160 000 € | |
| 335000 Stock travaux | 60 000 € |
Pour un prix de vente du lot 1 de 250 000 €. La marge est donc de 250 000 – 220 000 = 30 000 €. Il reste ainsi en compte de stocks 33X000 = 0 €.
